Doit-on se fier à l’opinion commune qui veut que le chien soit le meilleur ami de l’homme ? Difficile de le croire quand on constate la multiplication des attaques parfois mortelles commises par les chiens sur les hommes. En effet, dans la plupart des pays occidentaux, il ne se passe de semaine sans qu’on apprenne qu’un molosse ait mordu ou déchiré un enfant ou un homme. Pourquoi les chiens attaquent-ils les hommes ? Seraient-ils contrôlés par des forces internes que nous ne sommes pas arrivés à maîtriser complètement quand nous sommes parvenus à le domestiquer ? Se peut-il qu’il soit un traître, un fourbe qui se prétend être nôtre ami alors qu’en fait il ne veut que notre destruction ? Je dois l’avouer, j’ai peur des chiens. Surtout des grands dogues près desquels j’évite toujours de marcher. Car on ne sait jamais ce qui peut déclencher chez lui une soudaine envie de sauter sur vous. Mais j’ai toujours pris intérêt à regarder les autres types de chiens droit dans les yeux et j’ai toujours été fasciné par la variété de choses indéfinissables que j’ai cru y déceler. Tristesse infinie, soumission douce, révolte contenue, arrogance vulgaire, fierté collective… toute la gamme des sentiments que nous n’attribuons qu’à nous-mêmes semble passer aussi dans les yeux des chiens. A mon avis, le chien est le seul animal domestique dont les yeux semblent refléter des sentiments si proches de ceux des humains. Les yeux des chiens nous parlent. Pourtant, quand ils sont en meute, ils peuvent se révéler d’une agressivité sauvage envers nous. Les plus forts physiquement peuvent nous attaquer individuellement avec encore plus de férocité.
A quoi pensent les chiens ? Cette question m’a toujours fasciné. Comment ces yeux tellement expressifs peuvent-ils ne rien éprouver, ne rien ressentir, ne rien communiquer ? Ils doivent bien se dire quelque chose à défaut de ne rien dire aux humains. Comme le petit de l’homme qui, à une certaine étape de son développement, pousse des sons que son entourage n’arrive pas à déchiffrer mais qui sont des tentatives de communiquer, il se pourrait fort bien que les aboiements du chien constituent aussi des tentatives de parole. Serons-nous un jour capables de les maîtriser ?
Malgré la sauvagerie de certains de leurs congénères, il y a une catégorie de chiens qui forcent le respect. Je pense ici aux chiens guides d’aveugles. Ce sacrifice de soi qu’on ne croyait possible que chez les humains, ce dévouement aux mal voyants, ce respect indescriptible que même certains humains ne professent pas à l’endroit de personnes aveugles devrait nous inspirer. Je n’ai jamais entendu parler de cas où un chien guide d’aveugle a attaqué l’aveugle en question. Les sentiments unissant le couple sont-ils donc si attachants que l’un ne peut littéralement se détacher de l’autre ? J’ai vu l’autre jour à la télé (TV5Monde) un reportage sur une cérémonie de médaille remise à des chiens guides d’aveugles qui prenaient leur retraite (c’étaient les chiens, pas les aveugles qui prenaient leur retraite). Le comportement de ces chiens dans cette situation si particulière n’était pas tellement différent de celui des êtres humains. Il ne leur manquait que la parole.
Pourquoi alors certains chiens sont-ils si prêts à attaquer, mordre et parfois tuer ? Je ne connais pas la réponse à cette question mais je crois comprendre ceci : dans la mesure où ces chiens qui attaquent et tuent « appartiennent » à des « maîtres », il en va de ces chiens comme de leurs maîtres. C’est une autre face du proverbe bien connu : « Tel père, tel fils ». Les « pitbulls » ou autres boxers, danois ou bergers allemands qui attaquent sans raison apparente sont des reflets de leurs maîtres (même si les trois derniers cités sont des chiens de garde dressés pour attaquer et tuer). A force de vivre ensemble, ils se sont dissous l’un dans l’autre. Le chien a hérité de son maître et n’en a gardé, semble-t-il, que les pires instincts. Le maître a failli à sa tache d’appliquer les règlements prescrits par les autorités responsables au sujet de la gestion canine. Le résultat : des personnes défigurées, des enfants succombant à une mort affreuse…Qui est vraiment à blâmer ? Qui doit-on punir ? Le maître ou l’animal ? Dans la plupart des sociétés occidentales, le maître reçoit généralement une amende tandis que le chien reçoit l’euthanasie. En adoptant une telle conclusion à des drames aussi déchirants, la société semble vouloir prévenir d’autres attaques du chien tueur et, peut-être, a-t-elle raison. Mais le maître semble s’être tiré d’affaire facilement, ne croyez-vous pas ?
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