Je m’arrange toujours à trouver du temps libre pour écouter la radio. La télé, pas vraiment. Sauf pour regarder des matches de tennis (je suis gâté ces jours-ci avec l’Open d’Australie) ou du foot européen ou suivre C-Span2 le week-end, je ne regarde guère la télé. Mais la radio, c’est autre chose. Mes 4 stations de radio préférées, c’est dans l’ordre : France-Culture, France Inter, la BBC et NPR. J’aime bien NPR (National Public Radio). Bien sûr, pas autant que France-Culture que j’écoute régulièrement depuis mes années d’adolescent à Port-au-Prince où j’avais érigé une longue antenne en bois sur le toit de notre maison qui me permettait d’écouter France-Culture et France-Inter aussi clairement que si j’étais en France, à travers le vieux « Grunding » de mes parents. En fait, je me demande comment j’ai fait pour réaliser toutes ces connexions de l’antenne à la radio et de la radio à l’antenne car j’ai jamais été très fort avec mes dix doigts.
Qu’est-ce qui me plait tant à NPR ? Oh, malgré tous les bons côtés de NPR, ce n’est pas bien sûr la « haute culture » que dispense France-Culture. Ce n’est même pas la « culture de moyenne intensité » véhiculée par France-Inter. Ce qu’on trouve à NPR est finalement relativement proche de ce qui se fait à la BBC : des grands titres présentés en moins de 7 minutes et qui sont approfondis au cours des 23 minutes qui suivent, puis de nouveaux grands titres qui sont eux aussi approfondis. De temps en temps, surtout le week-end, de grands dossiers sur des sujets de fond. Cependant, la qualité des reportages trouvés sur NPR dépasse, à mon avis, les commentaires que j’écoute sur la BBC. C’est vrai que la BBC se fait le devoir de couvrir presque tous les points de la planète et qu’il n’y a pas comme elle pour nous livrer les reportages les plus éclairés sur les endroits les plus reculés de la planète, et je n’exagère pas en disant cela. Cependant, même si les journalistes américains délaissent quelque peu l’international, il y a une qualité journalistique qui n’appartient qu’à NPR, qu’elle couvre des faits nationaux ou internationaux.
A New York, NPR est relayée par WNYC, une excellente station de radio que je considère presque sans égale dans la ville. WNYC diffuse depuis quelque temps une courte séquence de pub sans prétention commerciale que j’ai moi-même intitulée « It’s a free country ». Ce sont des variations ironiques, sarcastiques à partir de cette expression populaire américaine qui désigne d’après le « Cambridge Idioms Dictionary », deuxième édition, 2008 « something that you say which means that you have the right to do something even if someone else has criticized you for it. » (quelque chose que vous venez de dire qui signifie que vous avez le droit de faire quelque chose même si quelqu’un d’autre vous a critiqué pour cela). (Ma traduction). Voici un exemple: « I’ll shout if I want to. It’s a free country!” Depuis quelques années, cette expression est devenue extrêmement populaire aux Etats-Unis. Elle est devenue en quelque sorte le cri de ralliement de tous ceux qui veulent défendre leur « personal freedom » (la liberté individuelle) que certains croient menacée surtout depuis que M. Barack Obama a été élu président. L’extrême-droite américaine en a fait son cheval de bataille et les cerveaux faibles illuminés par les mousquetaires de Fox News ne ratent aucune occasion d’attaquer verbalement le président Obama, accusé d’être un communiste, de n’être pas américain, de vouloir confisquer les libertés individuelles, etc. Au-delà de l’extrême-droite américaine, ce qui semble assez inquiétant, c’est la tendance grandissante chez une majeure partie des Américains à associer les droits humains et les libertés essentielles qui sont les caractéristiques fondamentales de toute démocratie aux choses les plus triviales. L’expression « it’s a free country » sortie à tout bout de champ de la bouche des locuteurs témoigne de la banalisation dangereuse de l’idée des libertés individuelles dans la société américaine.
Bien sûr que nous avons le droit d’exprimer notre opinion sur tel ou tel sujet. Nous avons le droit de critiquer Barack Obama ou n’importe quel personnage public quelque puissant ou riche qu’il puisse être et, dans ce pays, c’est le premier amendement à la Constitution qui nous en donne le droit. Mais nous avons aussi tous appris (que ce soit en Haïti ou dans n’importe quelle société occidentale) que nous avons également des responsabilités civiques, des devoirs envers la société, la nation, la patrie ou nos concitoyens. Nous ne sommes jamais libres de dire ou de faire n’importe quoi. En anglais, on dit « Freedom isn’t free » (La liberté a un prix) (ma traduction). Je me garde d’entrer ici dans ce débat qui fait rage après la tuerie de Tucson dont tout le monde a entendu parler et pour laquelle certains ont blâmé la violence verbale qui a sévi sur certaines ondes radiophoniques américaines. Surtout après le superbe discours du président Obama à l’occasion des funérailles des victimes de la tuerie de Tucson. J’espère que les parents immigrés haïtiens sauront expliquer à leurs enfants qui peuvent facilement tomber victimes de la rhétorique trompeuse de ceux qui brandissent les fausses vertus du mythe « it’s a free country » les limites des libertés individuelles, aux Etats-Unis ou dans n’importe quelle autre société.
Contacter Hugues St. Fort à : Hugo274@aol.com

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