Dans quelques jours, l’année 2008 ne sera plus qu’un souvenir. Chacun de nous choisira le fait ou les faits qui l’aura le plus marqué. Pour la grande majorité d’entre nous qui vivons aux États-unis, ce sera sans doute l’élection de Barack Obama à la présidence américaine. Pour une grande partie du reste du monde, ce sera vraisemblablement aussi le même choix. Il faudra cependant se garder de généraliser et conclure que le monde entier est tourné complètement vers l’Amérique et a choisi Obama. Depuis quelque temps, à l’intérieur même de la société américaine ou parmi ses alliés les plus importants, de plus en plus de voix se font entendre pour parler du « déclin américain. » Même la puissance militaire américaine, dans la mesure où elle offre des signes de ratés considérables en Irak ou en Afghanistan, se prête à des questionnements pertinents. Mais il existe encore des voix (cf. Robert Kagan : « Still # 1 » (Toujours le premier) dans le Washington Post du 30 octobre 2008) qui proclament haut et fort que les États-unis dominent toujours le reste du monde.
Je retiendrai trois événements marquants que je n’oublierai pas de si tôt de cette année 2008. Le premier, c’est bien sûr l’élection de Barack Obama. Le deuxième, c’est le développement de la plus grande crise financière que le monde capitaliste ait jamais traversée depuis la fameuse récession de 1929. Le troisième, c’est la défaite de Roger Federer en finale de Wimbledon.
Qu’est-ce qui n’a pas été dit au sujet de cette éclatante victoire de Barack Obama le 4 novembre 2008 ? Mes réflexions auront donc une allure personnelle, intérieure, hautement individualisée. Barack Obama signifiait pour moi, immigrant haïtien qui a choisi de vivre aux États-unis, le point de départ d’une nouvelle Amérique qui allait se réconcilier avec le monde. Et moi-même, j’allais me réconcilier avec cette Amérique qui était en train de se faire détester à travers le monde. Je n’aurais plus honte de cette société qui foulait aux pieds les idéaux de justice, d’inclusion sociale et de liberté qu’elle avait appliqués sans peur chez elle et dans le monde. J’étais prêt à accorder mon pardon à la droite pure et dure qui avait réussi à dresser les ouvriers américains dominés et exploités contre la majorité des immigrants et des minorités raciales et ethniques. Je me souviendrai toujours des images de CNN proclamant la victoire de Mr. Obama et de la marée humaine qui se pressait à son quartier général attendant qu’il se présente pour remercier ceux qui ont été les artisans de sa victoire. Quand il est finalement apparu aux côtés de sa femme et de ses deux resplendissantes filles, quand il a commencé à parler et que Jesse Jackson s’est mis à pleurer, je n’ai pu m’empêcher moi aussi de laisser couler des larmes chaudes et sincères.
Le deuxième événement auquel j’associerai toujours l’année 2008 est sans conteste la crise financière la plus grave que le monde capitaliste ait jamais traversée depuis la récession de 1929. Je me demande comment la plupart des experts économistes de nos universités, nos centres de recherche, nos cercles de réflexions (Think tanks) dont le métier est d’étudier le comportement des marchés financiers ont été incapables de prévoir le cataclysme qui est en train de submerger le capitalisme financier. La crise est partout : dans les finances internationales, dans l’immobilier, dans l’alimentaire, dans l’énergétique, dans toutes les microstructures économiques. Certains économistes pensent que leur discipline est devenue trop spécialisée et se complait trop dans des modèles théoriques qui sont détachés des réalités économiques qui gouvernent le monde réel. C’est une explication qui vaut pour d’autres disciplines dans les sciences humaines et sociales (je le vois chaque jour dans ma propre discipline, la linguistique). Mais c’est cette même modélisation qui a permis de rehausser le statut de nos disciplines dites sociales et leur permettre de rivaliser avec les sciences dites « dures ». La crise est si grave que les sociétés anglo-saxonnes (Grande-Bretagne, États-unis) qui ont toujours prôné un capitalisme pur et dur où l’intervention de l’état est considérée comme un sacrilège en sont réduites à ce …sacrilège : entre septembre et décembre 2008 des centaines de milliards de dollars de fonds publics ont été versés dans ce capitalisme pour le relancer et l’empêcher d’imploser. Il se révèle que cette mondialisation qu’on célébrait à grands cris se trouve elle-même dans une impasse et qu’elle entraîne avec elle le capitalisme. Pourra-t-il s’en sortir cette fois ?
Le troisième événement qui marquera mon esprit par rapport à l’année 2008 restera la défaite de Roger Federer face à Raphaël Nadal en finale de Wimbledon. On savait que Federer traversait une période particulièrement difficile en cette année 2008 où il n’avait gagné (jusque là) aucun tournoi de grand chelem et même aucun tournoi sérieux. Mais on savait aussi qu’il était le roi de Wimbledon et qu’il avait déjà conquis ce tournoi mythique cinq fois de suite. J’espérais donc qu’il pourrait se ressaisir et remporter une sixième fois ce tournoi, acte suprême que personne n’avait réussi à faire. J’y ai cru jusqu’à la fin mais le miracle n’est pas arrivé. Pour moi, la déception a été immense. Je sais que mes lecteurs me traiteront de tous les noms et, dans une certaine mesure, ils n’auront pas tout à fait tort. Mais ma passion du tennis et l’admiration que je porte à ce joueur de génie que j’estime être le plus grand joueur de tennis de sa génération (certains disent de tous les temps) dépassent la raison et devient une affaire personnelle. Dans trois semaines environ, commenceront les Internationaux d’Australie. Ma passion se rallumera. Je serai face au petit écran pour jouir des coups droits dévastateurs, des revers de charme, des services « inretournables », des lobs imparables et de la joie qui explose sur le visage du vainqueur.
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