Comme tout le monde ces jours-ci, je réfléchis aux élections présidentielles du 4 novembre prochain. Une chose est certaine cependant : quelle qu’en soit l’issue, ce sera une véritable première dans la société américaine puisqu’on verra soit un président noir, soit une vice-présidente. Cela changera-t-il quelque chose tout de suite dans les rapports entre les individus ? J’en doute vu que les rapports entre les êtres humains prennent du temps à vraiment évoluer pour le meilleur. Après cinq siècles aux États-unis, il y a encore un nombre relativement important d’individus « blancs » qui jugent d’autres individus non-blancs sur la couleur de leur peau. Quand cette couleur est noire, ces « Blancs » prédéterminent que ces individus leur sont inférieurs et par conséquent ne peuvent pas avoir accès aux mêmes avantages qu’eux. Curieusement, le thème racial n’est pas aussi répercuté qu’il devrait l’être au cours de ces élections présidentielles. A mesure que la date fatidique se rapproche, certains écervelés tendent à le faire revivre plus profondément dans les réunions électorales, mais d’une manière générale, le thème racial, compte tenu des enjeux dont il est porteur, n’occupe pas le devant de la scène.
Il est largement admis que les minorités raciales vont jouer un rôle de premier plan dans les résultats des élections du 4 novembre prochain. Parmi ces minorités, les Noirs et les Hispanophones représenteront une majorité de la population américaine. On les trouve généralement dans les grands états tels que la Californie, le Texas, la Floride, New York et l’Illinois qui sont toujours cruciaux pour la victoire finale. Selon le Bureau du recensement, en 2006, le pourcentage des personnes vivant dans la pauvreté était plus élevé chez les Africains américains (24.3%) et les Hispanophones (20.6%) que chez les Blancs américains non hispaniques (8.2%).
Pourtant, Obama n’accorde pas une très grande importance aux problèmes raciaux et préfère mettre l’accent sur les problèmes sociaux. En cela, il se détache énormément des politiciens africains-américains de l’ère des droits civiques tels que Jesse Jackson. Dans son fameux discours d’orateur principal en 2004 à l’occasion de la Convention Démocratique Nationale, Obama avait dit ceci : « There is not a Black America, a Latino America, an Asian America, there is the United States of America » (Il n’y a pas une Amérique noire, une Amérique latine, une Amérique asiatique, il n’y a que les États-unis d’Amérique »). Obama continue de privilégier cette approche. Tout se passe comme s’il fait passer les questions de classe avant les questions de race.
Une telle stratégie se révèlera-t-elle payante le 4 novembre prochain ? Cela fait déjà quelque temps que d’éminents sociologues américains tels William Julius Wilson défendent la thèse de la primauté des questions de classe sur les questions de race au sein de la société américaine. Un triomphe d’Obama consacrerait le succès de la thèse du professeur Wilson. Et pourtant, il est difficile de croire que dans cette Amérique dans laquelle nous vivons les questions de race pourraient aussi facilement disparaître. According to the McClatchy Newspapers, « McCain leads by 48% to 39% among whites; Obama by 91% to 4% among Blacks; by 64% to 18% among Hispanics; and by 63% to 37% among other races and ethnicities » Une telle difference d’échelle montre à quel point les électeurs sont polarisés par race. Dans beaucoup d’états qui avaient voté pour le président Bush en 2004, la tendance se confirme dans les sondages que la majorité des Hispanophones et des Africains-américains vont voter pour Obama. Les minorités raciales redoutent que l’aggravation des conditions économiques leur serait fatal puisqu’elles seront celles qui souffriront les premières et d’une manière catastrophique. Pour elles, Obama possède un meilleur plan de sauvetage sur des questions cruciales telles que le logement, l’éducation, les services de santé et l’économie en général. Donc, les questions de race ne peuvent facilement être mises à l’écart au sein de la société américaine. Qu’on le veuille ou non, c’est la question raciale qui va inciter les minorités raciales à voter pour Obama. Elles le feront par processus d’identification ; Obama sera la personnalité inspiratrice. Peut-être une nouvelle ère est-elle en train de s’annoncer dans la politique américaine ? Mais ne mettons pas la charrue avant les bœufs. Attendons la date fatidique du 4 novembre.
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